25 mai 2009
Vers l'harmonisation fiscale?
Et si la crise offrait une formidable opportunité de progresser sur la voie de l’harmonisation fiscale dans l’Union ? En effet, pour la première fois depuis longtemps, tous les pays sont confrontés à une grave récession qui les oblige à creuser leur déficit public et à s’endetter. Plus personne n’est vertueux, plus personne ne peut soupçonner les capitales favorables à une telle harmonisation de vouloir augmenter les impôts de tous pour ne pas avoir à prendre les mesures qui s’imposent pour purger leurs comptes publics.
C’est une évidence que de dire, qu’une fois la crise passée, il faudra ramener les budgets à l’équilibre et rembourser les sommes empruntées. Autant dire que l’époque du désarmement fiscal est derrière nous : les États vont certes couper dans les dépenses publiques, mais surtout augmenter les impôts tant sur les revenus, que sur les entreprises, la consommation et même les capitaux (qui auront désormais du mal à trouver un asile anonyme, effet collatéral bienvenu de la crise). Jamais dans le passé, les États n’ont eu autant intérêt à se mettre d’accord sur des bases d’imposition minimale dans l’Union afin d’éviter une concurrence fiscale qui, pour le coup, risquerait de s’avérer catastrophique à long terme. Imaginons qu’un État renonce à toute augmentation d’impôt, par crainte de voir les entreprises et les capitaux filer ailleurs. Soit, il s’engage dans la spirale de la dette, soit dans celle d’une diminution drastique des dépenses publiques. Dans les deux cas, la facture sera extrêmement lourde, soit en terme budgétaire, soit en terme de croissance. Et les quelques entreprises qu’il attirera ne suffiront à éponger la note.
Dans un premier temps, il s’agirait essentiellement de se mettre d’accord sur la base imposable en matière d’impôt sur les sociétés. Car le taux n’est pas tout : est-ce un pur hasard si l’impôt sur les sociétés rapporte plus en Grande-Bretagne qu’en France (par rapport au PIB) ? Avoir une base fiscale (ce que l’on impose) étroite et un taux élevé peut être plus avantageux pour une société qu’une base fiscale étendue et des taux bas… À cette base fiscale minimale seraient appliqués des taux différents selon les États. Mais pourquoi ne pas imaginer ensuite un taux minimal afin de limiter la concurrence fiscale à l’avenir ? De même en matière de taxation des dividendes ou de revenus des dividendes. Le système, qui existe déjà pour la TVA, pourrait être resserré. Cette harmonisation pourrait se faire hors traité si certains États la refusent, comme elle s’est déjà faite dans le cadre de Schengen pour la libre circulation et la coopération policière et judiciaire.
Les Européens n’échapperont pas non plus à un débat sur l’emprunt européen. Le système pourrait être double : lancer des emprunts purement européens destinés à financer des projets européens et gérer en commun une partie du stock de dettes existantes afin d’en diminuer le coût. Une idée encore hérétique il y a quelques mois, mais à laquelle réfléchissent déjà plusieurs gouvernements. Bref, la crise pourrait permettre à l’intégration communautaire de faire un bond de géant.
J.Quatremer
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