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15 avril 2010

Y a-t-il encore un ministre de l’intérieur ?

Le Président de la République recevra donc prochainement les syndicats de policiers, puis les représentants de la gendarmerie, à l’Elysée. C’est une première, mais après tout grand bien lui fasse de s’inquiéter du moral des forces de l’ordre.

Reste que l’initiative n’est pas anodine et que l’on ne peut s’empêcher de se demander s’il y a encore un Ministre de l’intérieur. Chacun a bien noté que ce ne sont pas les directeurs de la police que le Président reçoit, mais les responsables syndicaux.

Pour le Ministre de l’Intérieur en fonction Brice Hortefeux, si fidèle soit-il, c’est un nouveau camouflet. Cela avait commencé dès septembre 2009 lorsque Sarkozy, en personne, était venu place Beauvau pour sermonner les policiers et exiger d’eux de meilleurs chiffres. Jamais un ministre de l’intérieur, ainsi placé sous tutelle, n’avait autant été infantilisé. De fait, Nicolas Sarkozy est le premier artisan d’un véritable travail de sape affaiblissant l’autorité de son Ministre. Lequel est, ces jours-ci, encore plus affaibli. Dernièrement il a été affublé de l’hypothèse de la nomination d’un secrétaire d’Etat pour le suppléer. Et il vient de commettre une nouvelle bourde en annonçant des arrestations qui n’avaient pas encore eu lieu dans l’atroce affaire de l’agression de Grenoble.

Le message de la réunion Elyséenne parait d’autant plus limpide que cette rencontre avec les syndicats de police est annoncée le jour même où il se dit – encore des rumeurs ! – que dans le cadre de la réorganisation de l’Elysée, Claude Guéant pourrait à terme quitter ses fonctions pour devenir ministre. De quoi à votre avis ?

Quant à la fonction de Chef de l’Etat, c’est assurément la preuve que Sarkozy ne se fait définitivement pas à la charge de Président de la République. C’est comme une sorte de syndrome de la régression infantile : pour échapper au naufrage actuel, il aimerait tellement redevenir Ministre de l’Intérieur…

Mais cette régression, si elle démontre l’affolement du pouvoir, ne sera que de peu d’effet sur la politique de sécurité. Car l’échec que tout le monde constate désormais, c’est d’abord l’échec de Nicolas Sarkozy. Il est déjà, depuis le début, depuis 2002 et sans discontinuer, en première ligne sur ce dossier de la lutte contre l’insécurité. Qu’il le soit un peu plus ou un peu moins ne change rien. Plus il en fait, plus il souligne son échec.

Les policiers n’attendent pas d’avantage du déjeuner de calinothérapie du mois d’avril qu’ils n’attendaient des injonctions et des rappels à l’ordre du mois de septembre. Ils n’en peuvent plus de l’exacerbation des violences et demandent des moyens, l’arrêt de la révision générale des politiques publiques et l’abandon de la politique du chiffre.

Refusant de s’y résoudre, le pouvoir est dans une impasse et ne sait plus quoi inventer pour en sortir. Il veut croire que tous ces ennuis proviennent du fait que les forces de l’ordre seraient mal dirigées et qu’il suffirait de changer les hommes et de l’autorité du Président pour que tout aille mieux. C’est se tromper lourdement. Car la politique de sécurité n’a pas besoin d’une reprise en main, elle a besoin d’une rupture.

Delphine Batho
Députée des Deux-Sèvres

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