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31 mai 2009

Ségolène Royal plaide pour les « États-Unis d’Europe » dans l’indifférence médiatique

Foin des précautions conceptuelles des leaders du PS qui ne veulent surtout pas s’aliéner l’électorat noniste (avec le succès que l’on voit, celui-ci étant désormais donné à 20 % d’intentions de vote) : Ségolène Royal a proclamé, mercredi 27 mai, lors d’un meeting à Rezé, que « le moment est venu de créer les États-Unis d’Europe ». La candidate socialiste à l’élection présidentielle de 2007 renoue ainsi avec éclat avec le fédéralisme des pères fondateurs dont elle se veut l’héritière.

Dans un vrai discours de combat, elle invite le Parlement européen à se transformer en constituante : « n’écoutez pas ceux vous dirons que ce n’est pas votre mandat : les délégués des États généraux n’avaient pas non plus reçu mandat de déclarer les Droits de l’Homme, pourtant ils l’ont fait. N’hésitez pas, députés socialistes, à faire entre l’Europe dans l’histoire. Appelez les parlements nationaux en renfort (…), appelez les peuples en soutien ». « Nous voulons plus d’Europe, nous voulons une Europe de plus », a-t-elle martelé : « vous devez faire l’Europe unie, l’Europe unie des peuples d’Europe ».


Pour elle, si les citoyens s’éloignent de l’Europe, c’est parce que « nous restons en deçà des désirs des peuples ». Si elle n’a pas détaillé l’architecture institutionnelle qu’elle souhaitait, elle a néanmoins indiqué qu’elle souhaitait l’élection au suffrage universel d’un « Président de l’Europe » et des « listes transnationales » pour les prochaines élections européennes. Pour Royal, l’alternative est simple : « ou l’Europe marche vers l’unité politique, ou elle se disloque dans les nationalismes. Et comme l’a dit François Mitterrand, le nationalisme c’est la guerre ».

Un discours courageux qui rompt avec le ronron de la campagne, mais dont aucun média (hormis
Bernard Guetta dans sa chronique sur France Inter vendredi matin) n’a pourtant parlé. Presse écrite, télévision, radio se sont contentées de commenter la mise en scène de la réconciliation entre « Ségolène et Martine » destinée à sauver le soldat socialiste en perdition, décrivant même parfois les tenues des deux adversaires provisoirement amies. Je n’ai découvert ce discours que tardivement parce qu’un journaliste de mes amis a attiré mon attention sur la véritable révolution qu’il constituait. Devant un tel black out médiatique, comment s’étonner que l’abstention sera sans doute le grand vainqueur d’un rendez-vous pourtant fondamental pour l’avenir? Le discours de Royal avait pour but de lancer un vrai débat sur le projet européen : faut-il revenir à l’État nation, s’en tenir à l’existant ou accélérer le mouvement, face aux crises qui ravagent le monde ? Manifestement, personne n’a envie d’un tel débat, que ce soit du côté des politiques ou des journalistes. Le citoyen n’est pas censé s’intéresser au fond.


Pourtant, un sondage Eurobaromètre, réalisé en avril et mai dernier auprès de 2000 Français de 15 ans et plus, montre que 69 % d’entre eux se sentent mal informés sur le fonctionnement de l’Union européenne, soit six points de plus qu’en 2006, date de la précédente enquête Eurobaromètre réalisée quelques mois après le référendum de 2005. Et seuls 7 % des Français se sentent bien informés, soit 3 points de moins qu’en 2006. 71 % des sondés estiment que les médias devraient leur parler davantage d’Europe (curieusement -9 points par rapport à 2006) et 76 % (-11 points) attendent la même attitude des politiques.

J.Quatremer


30 mai 2009

L’Alphabet du goût juste

Au régime? Lisez «Lettres de goût», dictionnaire gastronomique et sensoriel. Une vraie friandise qui ne fait pas prendre un gramme.

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Un petit chef-d’œuvre que ce dictionnaire gastronomique et sensoriel dédié au répertoire gourmand d'un philosophe dont la pensée définit, depuis cinquante ans déjà, les bases du goût juste. Jacques Puisais, œnologue et gastronome, nous livre ici, sous la plume de notre confrère et complice Denis Hervier, une poignée de mots riches en messages et en observations. Le sage de Chinon y énumère toutes les émotions verbales que la table française lui inspire pourvu que l'assiette soit à l'écoute du verre. De «Accord», qui marie toujours la géographie et le plat, à «Zèbre: lorsqu'un vin s'en va tout de suite [fluet, plat], on dit qu'il file comme un zèbre», le Pr Puisais revisite sans concession, ni méchanceté, le paysage gustatif en assenant ici et là, en une ou deux phrases, quelques vérités faisant plaisir à lire. Une friandise que l'on déguste lettre à lettre sans satiété.

Lettres de goût. L'abécédaire de Jacques Puisais, de Denis Hervier, éd. Féret. 141 p., 18 €.

 P.L.