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06 juin 2009

Trois petits mots... et la liberté d'expression ?

Par l'équipe de Ségolène Royal

Voici bientôt 220 ans, le 26 août 1789, les représentants du peuple Français, "considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'Homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des Gouvernements", gravaient dans le marbre de la Déclaration des droits les deux articles suivants :

Art. 10 : Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi.
Art. 11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre à l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.

Nous sommes en 2009. Le 11 juin prochain à 16h, Dominique Broueilh, habitant le département des Landes, sera entendue par la police judiciaire de Dax. Son délit ? Injures publiques envers un membre du gouvernement. Les faits ? Trois mots écrits en commentaire d'une vidéo de la Secrétaire d'Etat à la famille Nadine Morano : "Ouh, la menteuse".

Trois petits mots. Et une plainte. Une mère de famille prise dans les "mailles du pouvoir" aurait dit Michel Foucault. Des mailles fines, serrées, promptes à sanctionner les déviances prêtées à ceux qui osent encore critiquer, contester, parler. Tout simplement parler.

Le pouvoir a guetté et traqué les traces virtuelles laissées par la colère d'une personne honnête, une personne comme vous et nous.  Et la machine à punir s'est mise en branle. Froidement. Méthodiquement. Rationnellement. Sans même se rendre compte du décalage inconcevable entre le prétendu délit et l'ampleur donnée à l'"affaire".

Ce qui se passe est grave. Ce n'est pas un vacarme minuscule, mais la preuve supplémentaire d'une dégradation de l'Etat de droit. Prenons-y garde. Si nous nous endormons, anesthésiés par l'habitude et la routinisation de l'arbitraire, qui sait dans quel état notre République s'éveillera demain.

05 juin 2009

Les «Etats-Unis d’Europe»(B.Guetta)

.../...C’est en observant le système fédéral américain que Victor Hugo avait conçu le rêve des «Etats-Unis d’Europe» et, en disant que ce rêve était l’objectif ultime du processus d’unification européenne, Ségolène Royal vient de dire comment redonner une clarté à une entreprise devenue obscure aux Européens. Ces trois mots, même les plus déterminés des partisans de l’unité de l’Europe n’osaient plus les employer. Par crainte de paraître utopistes, ils disaient «Europe politique» ou «Fédération d’Etats-nations». Etats-Unis d’Europe, on ne peut pas, pensaient-ils, car ce serait rompre avec la Grande-Bretagne, effaroucher les Polonais, susciter de nouvelles querelles bien plus violentes encore que celle du traité constitutionnel. C’est vrai. Les Etats-Unis d’Europe restent un tel chiffon rouge pour tant de gens dans tant de pays qu’à l’agiter, on ferait tanguer le navire européen mais que vaut-il mieux ?

Que le débat s’ouvre et que ses termes se clarifient, ou qu’on en reste à cet entre-deux si pernicieux où l’Union européenne hésite entre être et ne pas être ? Vaut-il mieux le souffle d’une bataille politique ou le désintérêt que suscite aujourd’hui une union qui a, déjà, tant des attributs d’un Etat fédéral mais n’en a ni les politiques ni le gouvernement communs ? La réponse est dans la question. L’Union ne pourra pas éternellement rester au milieu du gué et, parce qu’elle est parlante, la formulation de Victor Hugo aurait l’avantage de faire voir et préciser les deux projets qui s’opposent depuis plus d’un demi-siècle, depuis le premier des traités européens. Les uns acceptent - comment la refuser ? - l’idée de l’unité mais strictement limitée à la création d’une union commerciale et monétaire n’empiétant pas sur les prérogatives des Etats. Les autres veulent un Etat commun, un Etat européen, soit avec un Premier ministre procédant d’une majorité parlementaire, soit avec un président élu au suffrage universel mais, dans l’un ou l’autre cas, un exécutif désigné par le suffrage universel paneuropéen.../...

Rêvons, un instant. Imaginons que les partisans des Etats-Unis d’Europe sortent du bois et expliquent les institutions européennes en disant que le Conseil européen, l’assemblée des chefs d’Etat et de gouvernements, est la Chambre des Etats, ce qu’est le Sénat à Washington ; que le Parlement est ce qu’est la Chambre des représentants, celle de l’Union ; qu’il est logique, comme dans tout système fédéral, qu’il y ait «codécision» entre ces deux chambres mais que l’exécutif de l’Union, la Commission, ne doit pas procéder des Etats mais de la majorité parlementaire désignée par l’électorat paneuropéen. C’est ce que prévoit, d’ailleurs, le traité de Lisbonne et, dès lors, l’enjeu des élections européennes deviendrait clair. Il s’agirait de désigner, par ce vote, le président de la Commission qui, fort d’un mandat populaire, deviendrait le Premier ministre de l’Union, de droite ou de gauche suivant les résultats de ce scrutin. Ce serait alors aux électeurs de choisir, programme libéral contre programme social, modèle anglo-saxon ou modèle européen, toute puissance du marché ou arbitrage d’un Etat entre le capital et le travail.

L’Union ne serait plus un Ovni, menaçant car mystérieux, mais un instrument politique nécessaire - celui de l’affirmation des nations européennes et d’une puissance publique de taille continentale, à même de peser sur un marché mondialisé.