« La gauche va pulvériser l’UMP » aux élections européennes. C’est ce qu’a prédit Jean-Christophe Cambadélis, le directeur de campagne du Parti socialiste pour les élections européennes, vendredi dernier au micro de RMC. Les sondages sont pourtant plus nuancés et place le PS entre 20 et 23% d’intentions de vote, à quatre points derrière l’UMP.
Rien de grave selon Cambadélis pour qui ces chiffres correspondent au « score habituel du Parti socialiste, qui fait entre 20 et 23% dans quasiment toutes les élections européennes ». Sauf qu’entre le début et la fin de la campagne, ces mêmes intentions de vote pour le PS ont eu plutôt tendance à fondre. Il faut dire que la campagne des socialistes pour les européennes a souvent changé de fil rouge. Et donné l’impression de commencer par la fin…
Acte I, le vote sanction
Il y a un mois, les stratèges de la rue de Solferino avaient opté pour le « vote sanction » comme slogan de campagne. Une stratégie généralement utilisée dans les derniers jours pour susciter la mobilisation et faire basculer les indécis. Rien de tout ça : au PS, on a commencé par là… Pendant les premières semaines de campagne, le nom de Nicolas Sarkozy est cité dans chaque discours et accolé à celui du Président de la Commission européenne, avec un seul mot d’ordre : haro sur Sarko et Barroso dans un paquet cadeau !
« Le 7 juin doit être un vote sanction contre Nicolas Sarkozy et contre ses alliés européens, c’est-à-dire monsieur Barroso (le président de la Commission européenne) » avait lancé mi-avril Benoît Hamon, porte-parole du PS. Avant d’ajouter : « Ce que nous n’avons pas pu obtenir par la mobilisation sociale, eh bien il faut essayer de l’arracher par les urnes ». Soit. Encore faut-il parvenir à se faire entendre…
Pressé par sa gauche, les Verts et par le MoDem, le Parti socialiste n’a pas réussi à imposer la spécificité d’un vote sanction socialiste. La stratégie était loin d’ailleurs loin de faire l’unanimité au sein même du parti… « C’était une grosse erreur que de commencer la campagne par “stop Barroso, stop Sarkozy” », lâche Jean-Louis Bianco, proche de Ségolène Royal. « C’est un argument de fin de campagne pour ratisser large », ajoute un député proche de François Hollande « avant, il faut faire du fond, de la pédagogie ». L’appel semble avoir été entendu…
Acte II, le vote utile
Début mai, nouveau virage. Fini le vote sanction. Les socialistes appellent au « vote utile », de peur de voir les autres partis de gauches leur grignoter quelques parts du gâteau électoral. « Il faut changer là-bas pour changer ici », lance Martine Aubry au Cirque d’Hiver, le 13 mai, à Paris. Avant d’ajouter : « Il faut voter pour une Europe utile ! Il ne faudra pas se dire : est-ce que je vote pour le rose pâle, le rouge vif, le vert ? Il faut voter socialiste, car c’est le seul vote utile » Le nom de Nicolas Sarkozy est à peine cité.
En revanche, la Première secrétaire s’adresse aux fonctionnaires, aux salariés du privé et du public, aux employés comme le lui avait conseillé plus tôt le porte-parole du parti, Benoît Hamon. Les socialistes se passent le mot d’ordre. Sur LCI, Vincent Peillon tête de liste dans le Sud-Est, prend pour cible Olivier Besancenot : « Combien de députés va-t-il faire perdre à la gauche en France en faisant 4,5 ou 6% des voix ? Sans doute entre cinq et dix et il permettra alors à l’UMP d’être devant le PS ».
Acte III, le vote de conviction
Dernière ligne droite avant le scrutin du 7 juin. Devant des sondages qui stagnent, les socialistes changent encore leur fusil d’épaules. Et passent à la phase « vote de conviction » avec la présentation de leur propositions, le 18 mai… à trois semaines du scrutin. Le PS place la question des services publics au cœur de sa campagne et propose « une directive cadre européenne permettant de sanctuariser les services publics ».
Martine Aubry passe la seconde et se présente comme « la proposante numéro un ». Ne fallait-il pas commencer par là ? « Le PS, dès le départ avait décidé d’une campagne en deux temps. Première phase : l’installation de la campagne avec une vaste opposition » à la politique du gouvernement, et « deuxième temps : le volet propositions », répond Claude Bartolone, membre de la direction. En clair tout a été pensé…
Acte IV, l’unité retrouvée
Même les retrouvailles laborieuses de Ségolène Royal et Martine Aubry ? Pas vraiment ! Le meeting commun, ce mercredi à Rezé (à côté de Nantes), entre les deux socialistes au fort caractère n’a pas été une sinécure à organiser. Avec le je t’aime, moi non plus fréquent au PS ! Et cette phrase de Royal qui a dû réjouir Aubry : « Les socialistes savent qu’ils peuvent toujours compter sur moi dans les moments difficiles » Raison qui explique que cette belle image d’un parti en ordre de bataille soit mise en scène à moins de trois semaines des élections européennes…
Quand d’autres auraient commencé par là…
M.Mourgue