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16 juin 2009

Où sont passés les 73e et 74e eurodéputés français ?

Nicolas Sarkozy ne se garderait-il pas pour la soif deux eurodéputés dans sa manche ? Car, si les Français ont élu 72 députés européens, ils seront 74 le 1er novembre prochain, lorsque le traité de Lisbonne entrera en vigueur, sauf nouvel incident irlandais. Or, personne ne sait comment ces deux élus supplémentaires vont être désignés. Autrement dit, les Français ont voté sans connaître la règle du jeu finale. Étonnant, non ?

En décembre dernier, le Conseil européen des chefs d'État et de gouvernement a décidé que si le traité de Lisbonne entrait finalement en vigueur, il s'appliquerait immédiatement aux institutions communautaires. En particulier, la nouvelle Commission, qui doit pourtant être nommée cet été, comptera un commissaire par État membre (et non plus un nombre inférieur à celui des États comme le prévoyait le traité de Nice) et le Parlement européen passera de 736 membres (Nice) à 751 membres. 

En tout, douze pays gagnent des députés : l'Espagne (+4), la France, le Royaume-Uni, la Suède, l'Autriche, (+2 chacun), l'Italie, la Pologne, la Bulgarie, la Lettonie, la Slovénie et Malte (+1 chacun). Normalement, l'Allemagne doit en perdre 4 (à 96), mais il est difficile de « désélire » des députés légalement élus. Résultat : Berlin gardera ses 99 députés cinq ans de plus et le nombre de députés sera temporairement de 754 au lieu de 751 (vous suivez ?).

Problème : comment désigner ces futurs députés ? Certains pays, comme la France, l'Italie, la Pologne, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont décidé de ne rien décider pour ne pas donner l'impression de préempter le vote irlandais. Les autres ont déjà adopté des lois ad hoc afin que le ou les sièges supplémentaires soient distribués aux suivants de liste en tenant compte du nombre de voix (y compris en cas de vote préférentiel).

Le problème est un peu particulier dans le cas de la France où le scrutin est régionalisé. À quelles
régions iront donc les deux sièges supplémentaires ? La logique voudrait qu'on les attribue aux régions qui l'auraient eu si Lisbonne avait été en vigueur, c'est-à-dire la région centre (5 sièges actuellement) et le Nord-ouest (10 sièges actuellement). Mais rien n'a été décidé et au cabinet de Bruno Le Maire, le secrétaire d'État aux affaires européennes, on est gêné aux entournures pour répondre. Car tout peut être envisagé y compris une manœuvre permettant à l'UMP d'engranger deux sièges supplémentaires : un scrutin complémentaire pour les deux sièges, les donner aux Français de l'étranger, etc.

La Tribune envisage une autre solution : donner un député supplémentaire aux régions nord-ouest et nord-est, celles-ci étant « les plus désavantagées dans le rapport élus/population, selon l'Insee ». Dans ce cas, selon la source citée par mes collègues, serait désigné le « candidat de la liste qui bénéficie du plus grand nombre de voix non productives. Dans les deux cas, au vu du scrutin de dimanche, c'est la liste d'Europe Écologie qui pourrait toucher le gros lot : François Dufour, battu à 81 voix dans le Nord-Ouest et Jacques Muller, distancé de 3.092 voix dans l'Est pourraient entrer au Parlement européen ». Ce qui permettrait à la délégation verte de passer de 14 à 16 membres contre 14 socialistes. Une petite humiliation qui pourrait bien plaire à Nicolas Sarkozy.

Mais, quelle que soit la solution finalement retenue, il faut reconnaître que la méthode n'est guère respectueuse de la démocratie : sans déplaire aux Irlandais, on aurait pu décider de la règle avant le scrutin « sous réserve que le traité de Lisbonne entre en vigueur ».

 J.Quatremer

Pour oublier (un court moment) la crise du PS...

Sans doute n'avez vous pas vu « Dogora »,un film de Patrice Leconte passé presque inaperçu à sa sortie en 2004. Et c'est bien dommage ! Nous avons été quelques uns, à La Charité, en présence de l'auteur, à faire jouer notre droit imprescriptible à la curiosité. Et nous nous en sommes bien trouvés !

Au pied de la lettre, il s'agit d'un documentaire sur le Cambodge ; au pied de l'écran, une oeuvre véritable d'une grande beauté : une heure sans parole , sans un mot, juste la musique (d'Antoine Perruchon) et l'image qui se fondent l'une dans l'autre comme le ciel et la mer à l'horizon ; les couleurs et les sons s'enlacent des les premiers moments pour ne plus se quitter. On y voit, et entend la douleur, la souffrance de tout un peuple ; on lit dans les yeux des adultes la stupeur d'être et dans ceux des enfants un espoir espiègle si constamment démenti par l'environnement dans lequel ils survivent ; on y voit l'immense chaos qu'est le monde ; et l'énergie vitale qu'y dépensent pour exister tout de même ceux qui en sont encore les damnés !

L'on sort pourtant de cette heure de projection sans amertume et sans colère. Sans l'humanité, même misérable, notre planète ne serait qu'un rond visage dénué d'expression. Par la beauté qu'il montre, Leconte donne à la pauvreté sa dignité, et proclame mieux qu'une Déclaration le droit élémentaire de tout homme, de toute femme, de tout enfant, au bonheur... Parce que l'homme ne peut, au plus noir de la vie, s'empêcher d'espérer. C'est ce que nous dit la mince lueur d'un regard capte par l'objectif...

Si la politique d'aujourd'hui vous rebute, allez voir ou commander Dogora, vous y trouverez plus de motifs d'agir ou d'espérer que dans aucun programme. La politique est ce qui reste a ceux qui n'ont pas le don de créer, de révéler, de montrer.

Gaëtan Gorce